Selon une recherche menée par le Prof. Eliezer Piasetzky et la doctorante Meytal Duer de l'Ecole de physique et d'Astronomie de l'Université de Tel-Aviv, sur le site de l'accélérateur Thomas Jefferson aux Etats-Unis, le nombre de paires proton-neutron dans un atome détermine la vitesse de déplacement des particules élémentaires de la matière. L'étude, réalisée en collaboration avec le Prof. Or Hen, et les Dr. Barak Schmookler et Axel Schmidt du MIT, se situe dans le cadre de recherches internationales qui ont pour but la compréhension de notre univers, et la réponse aux grandes questions que se pose l'humanité sur ses origines, et son avenir.
Elle a été publiée le 20 février dans la prestigieuse revue Nature.
Les quarks, les plus infimes particules connues de l'univers, sont infiniment plus petits que les protons et les neutrons dans lesquels ils évoluent et fonctionnent à des niveaux d'énergie beaucoup plus élevés. En 1983, des physiciens du CERN, dans le cadre d'un projet de collaboration européenne sur les muons (European Muon Collaboration - CEM), ont observé que les quarks situés ": dans le noyau d’un atome de fer contenant de nombreux protons et neutrons se déplacent de manière beaucoup plus lente que ceux du noyau de l'hydrogène, qui contient seulement un proton et un neutron. Donc, selon ce que l’on appelle désormais "l’effet CEM", plus les atomes sont gros, plus leurs quarks sont lents.
"Les physiciens cherchent une réponse à cette question depuis 35 ans"
Au cours de la présente étude, les chercheurs de l'Université de Tel-Aviv et du MIT ont trouvé pourquoi les quarks, éléments constitutifs de l'univers, se déplacent plus lentement à l'intérieur des noyaux atomiques. "Les physiciens cherchent une réponse à cette question depuis 35 ans", déclare le Prof. Piasetzky. Selon les chercheurs, la vitesse d'un quark dépend du nombre de protons et de neutrons formant des paires corrélées à courte portée dans le noyau de l'atome. Plus il existe de telles paires dans un noyau, plus le nombre de quarks à déplacement lent dans les protons et les neutrons de l'atome grandit. Dans les atomes avec de plus gros noyaux, qui contiennent davantage de protons et de neutrons, et ont donc forcément plus de chance de comporter un plus grand nombre de paires, les quarks se déplaceront plus lentement.
"Lorsqu'ils se touchent, les protons et les neutrons d'un atome peuvent former des couples de brève durée avant de se séparer et de prendre des chemins différents. C'est ce qu'on appelle les paires corrélées à courte portée ou SRC", explique Meytal Duer. "Pendant cette brève interaction à haute énergie, les quarks, dans leurs particules respectives, peuvent disposer d'un plus grand espace. Cette nouvelle explication pourra aider à éclairer les différences subtiles mais importantes du comportement des quarks, les blocs de construction les plus fondamentaux du monde visible".
Pour les besoins de la recherche, les scientifiques ont utilisé un détecteur de particules sphérique à quatre étages, le spectromètre CLAS, dans le cadre d’une expérience menée pendant plusieurs mois dans l’accélérateur à faisceau continu d’électrons CEBAF du centre Thomas Jefferson. L'expérience a rendu possible le recueil de milliards d'interactions entre électrons et quarks à l'intérieur de différents atomes, permettant aux chercheurs de calculer la vitesse du quark dans chaque interaction et de faire des comparaisons.
"Ces paires de courte durée et à forte énergie sont la raison du ralentissement des quarks", conclut le Prof. Hen du MIT. "Le niveau de ralentissement d'un quark dépend du nombre de paires SRC dans le noyau atomique. Les quarks du plomb, par exemple, s'avèrent beaucoup plus lents que ceux de l'aluminium, eux-mêmes moins rapides que ceux du fer etc.".
La recherche a été financée par le Département de l'Energie et la National Science Foundation aux Etats-Unis, la Fondation israélienne pour la science et la Commission israélienne de l’énergie atomique. L'équipe conçoit actuellement une expérience dans laquelle elle espère détecter la vitesse des quarks, en particulier dans les paires SRC.
Sur la photo: le spectromètre CLAS du laboratoire de l'accélérateur Jefferson aux Etats-Unis, utilisé pour réaliser les mesures (Crédit: Jefferson Lab). En bas à droite: le Prof. Eli Piasetzky
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