Des physiciens de l'Université de Tel-Aviv créent la technologie la plus fine du monde : deux atomes d'épaisseur

Nouvelle percée technologique à l’Université de Tel-Aviv : un groupe de chercheurs de l’Ecole de physique et astronomie et de l’Ecole de chimie, a réussi à concevoir ce qui est actuellement la technologie plus petite et la plus fine existante au monde, d’une épaisseur de seulement deux atomes, pour stocker les signaux électriques. La nouvelle technologie innovante devrait conduire à l’amélioration des appareils électroniques en termes de densité, de vitesse et d'efficacité, et stimuler le processus de lecture de l'information bien au-delà des technologies actuelles.

Technologiquee la plus fineL’étude a été menée par le Prof. Eran Sela, les Dr. Moshe Ben Shalom et Iftach Nevo et les doctorants Maayan Vizner Stern et Yuval Waschitz de l'Ecole de physique et d'astronomie, ainsi que les Prof. Michael Urbakh et Oded Hod et le Dr. Wei Cao de l'Ecole de chimie.

Elle a été publiée dans le prestigieux magazine Science.

« Nous nous intéressons au comportement des atomes et des électrons dans les matériaux solides, qui a généré de nombreuses technologies inhérentes à notre mode de vie moderne », explique le Dr. Ben Shalom. « Comme de nombreux autres scientifiques, nous essayons de comprendre, de prévoir et même de contrôler les propriétés fascinantes de ces particules, qui se condensent en une structure ordonnée que nous appelons un cristal. Au cœur de la technologie de l'ordinateur, par exemple, se trouve un minuscule cristal conçu pour basculer entre au moins deux états indiquant des réponses différentes, par exemple "oui" ou "non". Sans cette capacité dichotomique, il n'est pas possible d'encoder et de traiter l'information. Le défi pratique est de trouver un mécanisme qui permettrait ce basculement dans un dispositif petit, rapide et peu coûteux ».

Briser la symétrie du cristal

A l’heure actuelle, les dispositifs les plus évolués se composent de minuscules cristaux d’un million d'atomes (environ une centaine d'atomes de hauteur, de largeur et d’épaisseur), de sorte qu'environ un million d’entre eux peuvent être compressés sur la surface d'une pièce de monnaie, chaque appareil commutant à une vitesse d'environ un million de fois par seconde.

La percée technologique réalisée à l’Université de Tel-Aviv a permis aux chercheurs, pour la première fois dans le monde, de réduire l'épaisseur de ces dispositifs cristallins à deux atomes seulement. Selon le Dr. Ben Shalom, une telle structure permet aux mémoires basées sur la capacité quantique des électrons, de franchir rapidement et efficacement des barrières de quelques atomes d’épaisseur. Ainsi, elle peut améliorer considérablement les performances des appareils électroniques en termes de vitesse, de densité et de consommation d'énergie.

Pour réaliser l’étude, les chercheurs ont utilisé un matériau bidimensionnel : des couches de nitrure de bore et d'azote d'une épaisseur d'un atome, disposées en une structure hexagonale répétitive. Ils ont réussi à briser la symétrie de ce cristal en assemblant artificiellement deux de ses couches. « Dans son état tridimensionnel naturel, ce matériau est composé d'un grand nombre de couches superposées, chacune d’entre elles orientée à 180 degrés par rapport à celle d’en dessous, c’est-à-dire dans le sens opposé (configuration antiparallèle) », explique le Dr. Ben Shalom.

Un effort multidisciplinaire fructueux

« Dans notre laboratoire, nous avons pu empiler artificiellement les couches en configuration parallèle sans rotation, ce qui, hypothétiquement, place les atomes de même nature en parfait chevauchement, et ce malgré la forte force de répulsion entre eux (résultant de leurs charges identiques). En fait, le cristal à tendance à faire glisser légèrement les couches les unes par rapport aux autres, de sorte que seule la moitié des atomes de chaque couche se chevauchent parfaitement, bien qu’étant de charges opposées, les autres se retrouvant au-dessus ou au-dessous d'un espace vide : le centre de l'hexagone. Bien que cette configuration d'empilement artificiel soit plutôt moins stable que la configuration naturelle, les couches restent assez distinctes les unes des autres. Par exemple, si dans la couche supérieure seuls les atomes de nitrure de bore se chevauchent, dans la couche inférieure, c'est l'inverse ».

Le Dr. Ben Shalom souligne que la découverte a été rendue possible grâce aux efforts communs et particulièrement fructueux des chimistes avec leurs collègues de physique théorique, qui ont réalisé des mois de simulations informatiques « pour comprendre en profondeur pourquoi les électrons du système s'organisent exactement comme nous l'avions mesuré en laboratoire ».

Technologie la plus fine équipe

Maayan Wizner Stern, la doctorante qui a mené l'étude, explique : « La rupture de symétrie que nous avons réussie à créer en laboratoire, qui n'existe pas dans le cristal naturel, force la charge électrique à se réorganiser entre les couches et à générer une minuscule polarisation électrique interne perpendiculaire au plan de la couche. Lorsque nous appliquons un champ électrique extérieur en  direction opposée, le système glisse latéralement et change l'orientation de sa polarisation. Cette polarisation commutée reste stable même lorsque l’application du champ externe est arrêtée, comme c’est le cas dans les systèmes ferroélectriques tridimensionnels d’épaisseur courante qui sont largement utilisés dans les technologies actuelles ».

"Slide-Tronics"

« La capacité à réorganiser artificiellement la structure cristalline et électronique d’un système aussi mince, lui communiquant des propriétés de polarisation et d'inversion uniques qui résultent d’une interaction électrique de faible intensité (forces de Van der Waals) entre les couches, ne se limite pas au cristal de bore et d'azote », ajoute le Dr. Ben Shalom. « Nous nous attendons à des comportements similaires dans de nombreux cristaux en couches possédant les bonnes propriétés de symétrie. Le concept de glissement inter-couche comme moyen original et efficace de contrôler des appareils électroniques avancés est très prometteur, et nous l’avons nommé Slide-Tronics ».

« Nous sommes impatients de découvrir ce qui pourrait se passer dans d'autres situations que nous imposerons à la nature, et prévoyons qu’il sera possible de créer d'autres accouplements de ce genre. Nous espérons que la miniaturisation et l’inversement de la polarisation par glissement amélioreront les appareils électroniques actuels, et en particulier, permettront d'autres techniques originales de contrôle de l'information dans les appareils du futur », conclut Maayan Vizner Stern. « En plus des appareils informatiques, nous espérons que cette technologie contribuera à l’amélioration des dispositifs de détection, de stockage et de conversion de l'énergie, d’interaction avec la lumière, etc. Le défi tel que nous le concevons, est de découvrir d’autres cristaux capables de se comporter de cette manière ».

L'étude a été financée grâce au soutien du Conseil Européen de la Recherche (ERC), de la Fondation israélienne pour la science (ISF) et du ministère israélien de la Science et de la Technologie (MOST).

 

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