Le Dr. Iair Arcavi de l’Ecole de Physique et Astronomie de l’Université de Tel-Aviv, a participé, au sein d’une équipe internationale d’astrophysiciens, à la découverte d’un nouveau type d’explosion stellaire, la supernova à capture d’électrons, qui résulte de l’explosion d’étoiles dont la masse est 8 à 9 fois supérieure à celle du soleil. La découverte, observée dans une lointaine galaxie, éclaire également le mystère de la supernova de 1054, repérée par les astronomes de l'époque et dont les restes forment aujourd'hui la Nébuleuse du Crabe. Des supernovae de ce type ont été prédites théoriquement il y a environ 40 ans, mais jusqu'à présent, aucun cas convaincant n'a été observé dans l'univers.
L'étude a été publiée dans la prestigieuse revue Nature Astronomy.
Une supernova est une gigantesque explosion, résultant d'un déséquilibre entre deux forces opposées qui se produit dans une étoile à la fin de sa vie. La structure des étoiles est modelée par la force de gravité qui tente de les comprimer. Le soleil, par exemple, contrebalance cette force grâce à l'existence d'une fusion nucléaire dans son noyau, qui produit une pression s’opposant à la force de gravité. Tant qu'il y a combustion nucléaire, la force gravitationnelle ne réussit pas à faire s'effondrer l'étoile. Mais la combustion nucléaire finira par se terminer, tout juste comme le carburant dans un véhicule, et l'étoile s'effondrera alors sur elle-même. Lorsqu’une étoile en fin de vie est jusqu'à 8 fois plus lourde que le Soleil, il en restera un noyau compressé appelé naine blanche, dont la matière est si dense que les forces quantiques entre les électrons l'empêchent de s'effondrer davantage.
Une explosion à 31 millions d'années-lumière
Dans les étoiles dix fois plus lourdes que le soleil, les forces quantiques sont insuffisantes pour arrêter la compression, et le noyau continue de s'effondrer jusqu'à la formation d'une étoile à neutrons ou trou noir, dans un processus qui s’accompagne d'une énorme explosion. Les supernovas à capture d'électrons sont formées par les explosions d'étoiles 8 à 9 fois plus lourdes que le Soleil. Lorsque de telles étoiles s’effondrent, les électrons sont comprimés, ou plutôt piégés, dans les noyaux des atomes. Les forces quantiques ne peuvent alors plus arrêter la compression et l'étoile s'effondre et explose.
À ce jour, deux types principaux de supernovas ont été observés : l'un est l'explosion nucléaire d'une naine blanche, qui absorbe la matière d'une étoile proche ou d’une autre naine blanche qui entrent en collision avec elle. Le deuxième type est une explosion consécutive à l'effondrement du noyau d’une étoile 10 fois ou plus plus lourde que le soleil, dont le « combustible » nucléaire est épuisé, et qui s'effondre sur lui-même. Les astrophysiciens ont émis l'hypothèse que les étoiles de la gamme des masses intermédiaires, entre 8 et 10 masses solaires, exploseraient d'une autre manière, associée à la capture d'électrons.
Ce fut la théorie formulée dans les années 1980 entre autres par Kenichi Enomoto de l'Université de Tokyo. Au cours des dernières décennies, les astrophysiciens ont formulé des hypothèses sur la manière dont pourrait se dérouler l’explosion résultant de la capture d'électrons dans le cœur d’une étoile en train de s'effondrer. L'étoile est supposée perdre une substance d’une certaine composition chimique dans les années précédant son effondrement, et l'explosion elle-même est censée être relativement faible, produire peu de retombées nucléaires et disperser des éléments riches en neutrons.
La nouvelle étude à laquelle a participé le Dr. Iair Arcavi, décrit la supernova SN2018zd, découverte en 2018 par l'astronome amateur japonais Koichi Itagaki. Située dans la galaxie NGC 2146, cette supernova possède exactement toutes les caractéristiques attendues d'une supernova à capture d'électrons, qui n'ont été observées jusqu'à présent dans aucune autre supernova. De plus, comme elle est relativement proche de nous, à seulement 31 millions d'années-lumière, les chercheurs ont pu identifier l'étoile telle qu'elle apparaissait avant l'explosion, dans des images d'archives prises par le télescope spatial Hubble.
La lumière se fait sur la "Nébuleuse du Crabe"
Alors que d'autres supernovas découvertes dans le passé ne présentaient que certaines des caractéristiques attendues des supernovas à capture d'électrons, SN2018zd affiche les six caractéristiques correspondantes : une étoile dans la gamme de masse appropriée avant l'explosion, une perte de matière précédent l’explosion, une composition chimique spécifique, une explosion relativement faible, la dispersion d'une retombée nucléaire relativement faible, et la dispersion d’éléments riches en neutrons.
« Au début, nous nous sommes demandé ce qu'était cette étrange supernova », explique Daichi Hiramatsu de l'Université de Santa Barbara en Californie, qui a dirigé l'étude. « Peu à peu, nous avons réalisé que toutes ses propriétés pouvaient s'expliquer par le scénario d’une supernova à capture d'électrons ».
La découverte apporte également la lumière sur l'une des supernovas les plus célèbres de l’histoire. En 1054, l’explosion d’une étoile a été observée dans notre galaxie, la Voie lactée. Selon les archives chinoises de cette période, elle fut si brillante qu'elle était visible pendant la journée et projetait une ombre la nuit. Les restes de cette supernova, maintenant appelés la « Nébuleuse du Crabe », ont été étudiés en profondeur et se sont révélés d'une composition inhabituelle. Les scientifiques supposaient bien qu’il s’agissait d’une supernova à capture d'électrons, mais comme l’explosion s’était produite il y a près de 1000 ans, il était impossible de le prouver. La découverte de la supernova SN2018zd, renforce l’hypothèse que la supernova de 1054 était bien de type capture d'électrons.
« C'est incroyable qu'en utilisant des outils modernes, nous puissions faire la lumière également sur des événements historiques dans l'univers », a déclaré le Dr. Arcavi. « Aujourd'hui, avec les télescopes robots qui balaient le ciel avec une efficacité sans précédent, nous pouvons découvrir de plus en plus de phénomènes rares qui sont essentiels pour comprendre les lois de la nature, sans avoir à attendre 000 ans entre un événement et le suivant ».
Le Dr. Arcavi est membre du Projet Supernova Mondial (Global Supernova Project), et utilise le réseau de télescopes de l’Observatoire de Las Cumbres en Californie pour étudier des phénomènes rares à l’échelle humaine tels que les supernovas, les fusions d'étoiles à neutrons et les déchirures d'étoiles par des trous noirs.
Photos :
- Composition photographique de l'Observatoire de Las Cumbres et du télescope spatial Hubble de la supernova à de capture d'électrons SN2018zd (le cercle lumineux à droite), et de la galaxie dans laquelle il s'est produit, NGC 2146 (Crédit : NASA/STScI/J. DePasquale ; Las Cumbres Observatory)
- Le Dr. Iair Arcavi (Crédit photo : Israel Hadari)