L'Université de Tel-Aviv a tenu un séminaire en ligne le mercredi 8 novembre 2023 sur le thème des actions possibles pour faire libérer les otages israéliens détenus par l'organisation terroriste Hamas à Gaza depuis plus d'un mois. Au séminaire ont participé le Dr. Ayelet Levy-Shahar, médecin à l'Institut des sports de l'Université de Tel-Aviv, mère de Naama, 19 ans, enlevée au kibboutz Nahal Oz, le Dr. Rachel Goldberg, dont le fils a été kidnappé à la Rave party, et des représentants du Forum des otages et des familles disparues. Il a été présenté par le Prof. Liad Mudrik du Département de psychologie, et introduit par le Président de l'Université, le Prof. Ariel Porat.
Le séminaire a débuté par la projection d'une courte vidéo faisant défiler les images des 240 otages kidnappés par le Hamas lors de son intrusion meurtrière en Israël le 7 octobre dernier, dont le plus jeune est un bébé âgé de 9 mois lors de son enlèvement.
« Nous vivons un traumatisme continu au ralenti »
« Le 7 octobre, les terroristes du Hamas ont assassiné 1 300 Israéliens, et cruellement kidnappé 240 personnes, bébés, enfants, personnes âgées, femmes et hommes », a rappelé le Prof. Porat. « Les monstres du Hamas ne se sont pas contentés de tuer. Ils ont torturé, violé, et massacré des enfants devant leurs parents et des parents devant leurs enfants. Ils ont brulé des personnes vivantes, parfois des familles entières. Ils ont coupé des membres et commis toute sorte d'autres crimes difficiles même à imaginer. Le but du séminaire d'aujourd'hui est vous faire entrevoir, ne serait-ce qu'infiniment, la douleur des familles. Aidez-nous à faire en sorte que le monde n'oublie pas les otages de Gaza. Nous ne connaitrons pas de repos jusqu'à ce que le dernier d'entre eux ne rentre à la maison. La société israélienne a le devoir moral de ne laisser aucun de ses membres captifs de l'ennemi. C'est l'ethos sacré de notre peuple, car le Talmud nous dit "Tous les juifs sont responsables les uns des autres" ».
« En tant qu'universitaire, je suis consternée par ce qui se passent sur certains campus dans le monde, et quand je vois des affiches des otages déchirées. Il y a une grande différence entre critiquer Israël et ne pas reconnaitre que ce kidnapping est tout simplement un crime contre l'humanité, inacceptable pour tout être humain, quelle que soit sa position sur le conflit au Moyen-Orient », a ajouté le Prof. Mudrik.
« Nous vivons un traumatisme continu au ralenti, 33 jours atroces de douleur extrême sous ses facettes possibles : émotionnelle, psychologique, spirituelle, mentale et même physique, comme une brulure au troisième degré à l'intérieur du corps, de l'âme, du cœur », décrit Rachel Goldberg, dont le fils Hersh, a été kidnappé à Gaza pendant le massacre du Festival de musique de Reïm, et qui a fait il y a quelques jours un poignant discours à la tribune de l'ONU au nom des familles des otages. « Hersh venait d'avoir 23 ans le 3 octobre, c'est un amoureux des voyages, qui aime les gens de tous horizons différents. Il venait de faire un voyage en Europe où il a participé à six festivals de musique différents ».
« Le Hamas tirait à bout portant sur les véhicules »
« Nous nous sommes séparés de lui vendredi soir 6 octobre, après un diner de shabbat en famille. Il est parti à 11 heures du soir, avec son sac à dos. Il nous a embrassé, et a dit qu'il allait chercher son meilleur ami Aner Shapiro, qui vit également à Jérusalem et qu'ils allaient faire quelque chose d'amusant. Je lui ai dit « A demain ». Samedi matin, les sirènes ont retenti, j'ai réveillé mes deux filles de 17 et 20 ans, et nous sommes entrées dans la chambre sécurisée de notre appartement. Quand j'ai pris mon téléphone pour appeler Hersh, j'ai vu deux textos de lui, l'un disant « Je t'aime » et le suivant « Je suis désolé ». J'ai tout de suite compris que quelque chose de terrible s'était passé. Je ne savais pas où il était. Ma fille a vu sur Internet le massacre qui était en train de se passer au Festival de musique Nova, et nous avons vite compris par des amis communs que Hersh y était aussi ».
« C'était horrible, mon mari est rentré de la synagogue. Nous avons fini par savoir que Hersh, Ono et deux autres de leurs amis s'étaient échappés en voiture, qu'ils avaient commencé à prendre la route vers le nord ; mais le Hamas tirait à bout portant sur les véhicules. Ils ont alors abandonné la voiture, et couru vers un abri au bord de la route ou ils se sont réfugiés, avec 25 autres personnes. Nous avons su par des témoins que les terroristes du Hamas avaient jeté des grenades sur l'abri. Aner Shapiro a entrepris de calmer tout le monde. Il s'est mis à la porte de l'abri et a repoussé les grenades lancées vers l'abri avant qu'elles explosent. Il a pu en stopper sept, mais trois ont explosé à l'intérieur, provoquant un carnage. Le Hamas est alors entré dans l'abri, ils ont tiré une roquette RPG sur Aner qui est mort en héros - pour lui, il devrait exister un mot plus fort que héros. Puis ils ont tiré sur les autres à la mitrailleuse. La plupart des jeunes sont morts, d'autres agonisaient, d'autres enfin, huit, sont restés couchés sous les corps, feignant la mort. Ce sont eux qui ont raconté que Hersh et deux autres garçons étaient affalés sur le mur, blessés mais vivants. Son bras gauche avait été arraché en-dessous du coude. Il avait pu se faire un genre de bandage pendant les deux minutes qui avaient précédé l'entrée du Hamas dans l'abri. Ils ont été mis sur des camions du Hamas et emmenés à Gaza. Le dernier signal de son téléphone était à l'intérieur de Gaza, samedi à 10h25. Les huit jeunes en question ont été sauvés quatre heures plus tard, ils doivent leur vie à Aner Shapiro ».
« Tirée par les cheveux et menottée »
Dans son discours à l'ONU, Rachel Goldberg avait déclaré que « La violence et la haine sont des solutions de facilité que nous semblons toujours avoir adopté tout au long de l'histoire du monde, au lieu de nous servir de nos connaissances, de notre compréhension, et de notre créativité. D'un côté l'antisémitisme que nous voyons dans le monde entier à présent, ne me surprend pas. Mais alors, dites-le simplement, ne faites pas semblant. Cela fait des années que des gens disent ne pas être antisémites, mais ne pas aimer Israël, où ne pas aimer le gouvernement de Bibi etc. En fait ils sont antisémites, mais alors, dites-le tout simplement. Les otages proviennent de plus de 30 pays, ils sont âgés de 9 mois à 85 ans, ils recouvrent l'ensemble du spectre socio-économique, ils sont chrétiens, juifs, musulmans, bouddhistes, indouistes… et je suis effarée lorsque je vois des personnes dans le monde déchirer les affiches d'un travailleur thaïlandais venu en Israël pour gagner sa vie et retourner dans sa famille, kidnappé par le Hamas. C'est absurde ».
« Naama est une belle jeune fille de 19 ans, la 2e de nos quatre enfants », raconte le Dr. Ayelet Levy-Shahar. « C'est une athlète, spécialiste de triathlon. Après le lycée, elle a fait une année préparatoire de volontariat avant l'armée. Elle a fait partie d'un mouvement de jeunesse pour la paix qui réunit des jeunes juifs, palestiniens et américains. C'est une vraie militante pacifiste ».
« Elle venait juste de terminer plusieurs semaines de formation mercredi, elle est rentrée à la maison et devait retourner au kibboutz Nahal Oz, qui était sa nouvelle affectation, jeudi matin. Je l'ai emmenée à la gare, et j'avais l'intention d'aller lui rendre visite le samedi. Nous nous sommes éveillés samedi matin comme tout Israël au son des sirènes, nous sommes descendus dans l'abri de l'immeuble avec mes enfants et le chien. En remontant, j'ai envoyé un texto à Naama, elle m'a répondu qu'ils étaient dans la chambre sécurisée et "qu'elle n'avait jamais rien vu de pareil de sa vie". Sur le moment, j'ai pensé que c'était la première fois qu'elle était si proche de Gaza, et que donc, elle n'avait pas l'habitude d'entendre les missiles de si près, et je ne me suis pas alarmée. Vers 11h., mon ex-mari a téléphoné et nous a parlé d'une vidéo qu'il avait vu sur Télégram et les médias sociaux, de Naama kidnappée par le Hamas à Gaza. Je suis sûre que vous avez dû voir cette vidéo, elle était partout. Elle est vraiment horrible. Naama a été hissée hors de l'arrière d'un tender, tirée par les cheveux et menottée, un militaire du Hamas la tient et est en train de tirer et un autre la pousse vers le siège arrière du véhicule. Tout cela a été identifié comme étant à Gaza. C'est tout ce que nous avons. Depuis ce moment-là notre univers s'est figé ».
« Il est crucial que nous soyons la voix de ces familles »
« Nous avons participé à toutes sortes de réunions avec des leaders politiques en Israël et dans le monde entier. Mais il y a deux choses que je n'arrive pas à comprendre, d'abord ce qui est arrivé, et puis la réaction du monde. Quelle partie de ces atrocités n'avez-vous pas compris, qu'est-ce qui vous échappe ? Mon enfant, ma petite fille, a été kidnappée en pyjamas, pieds nus, saignant du bras et elle a été emmenée à Gaza par le Hamas-ISIS. Quelle partie de cela le monde ne comprend pas ? ».
Dorit Heldenberg-Sherel fait partie d'un groupe de plusieurs familles israéliennes qui se sont regroupées à Austin Texas, dans le cadre de la campagne « Bring them home » dirigée par le Forum des familles d'otages en Israël, et créent des évènements dans le but de sensibiliser à la situation des otages. « Nous collons des posters des otages, organisons des marches. Nous avons organisé une exposition de 240 chaises vides à la mairie d'Austin Texas. Les gens étaient touchés. Notre prochain évènement sera une course "Run for their life", chaque participant portant sur son dos une photo avec le nom et l'âge d'un otage. Je pense que ces évènements ont un impact car nous voyons le soutien que nous obtenons et les média sont avec nous. Nous avons également le soutien du gouverneur du Texas Greg Abbott, qui a même mis les drapeaux américains en berne pendant une semaine après le 7 octobre. Nous approchons aussi les différentes communautés chrétiennes, qui ont été aussi choquées que nous. Je pense qu'il est crucial que nous soyons la voix de ces familles partout et simultanément dans le monde ».
Le séminaire s'est terminé avec la prise de parole du Prof. Irwin Cotler, ancien ministre canadien de la Justice, fondateur et président international du Centre Raoul Wallenberg pour les Droits de l'Homme, détenteur d'un doctorat honorifique de l'université de Tel-Aviv, qui a mis sur pied un plan d'action pour la libération immédiate et inconditionnelle des otages.
Un crime continu contre l'humanité
« C'est un impératif humanitaire, moral, légal et international de premier ordre. Il s'agit d'un crime continu contre l'humanité et chaque jour de plus de cette disparition des otages et de leur détention en constitue une prolongation. Tous les Etats sont responsables et doivent en faire une priorité », dit-il.
Il a ensuite résumé les principaux points de son plan d'action : établissement d'une coalition multilatérale puisque les otages viennent de près de 30 pays; création d'un groupe d'action à l'ONU (l'Ambassadeur du Canada à l'ONU, Bob Rae, est en train d'organiser une action parlementaire dans différents pays; le Congrès et le Sénat américains ont déjà fait passer des résolutions, constituant des exemples que d'autres pays peuvent suivre). Des représentants des familles d'otages sont venus témoigner devant le comité des affaires étrangères du Parlement canadien pour que les crimes du Hamas et la responsabilité internationale pour les ramener les otages chez eux continue d'occuper le devant de la scène parlementaire et politique. Le Prof. Cotler propose également de faire pression sur le Qatar et la Turquie qui procurent une base et un refuge aux leaders du Hamas qui y vivent dans le luxe, de dénoncer la responsabilité de l'Iran qui finance et entraine le Hamas, de promouvoir un ensemble de réseaux d'initiatives légales, d'organiser des rassemblements de masse comme il y en a eu à Montréal et Toronto ; cette semaine une grande marche se déroulera à Washington.
« Nous sommes également en rapport avec des organismes de l'ONU pour démasquer et exposer la complicité de cette organisation, et la manière dont l'UNRA lui-même a incité à haine plutôt que d'éduquer à la paix. Nous allons avoir une apparition devant le Conseil de Sécurité de l'ONU, et allons enfin pouvoir combattre l'explosion incendiaire d'antisémitisme qui impacte toutes nos communautés, car le narratif du génocide israélien supposé des Palestiniens, escamotant le fait que le Hamas est une organisation antisémite génocidaire et lui dit lui-même dans sa Charte, menace de prendre le dessus ».
« Mon mentor Eli Wiesel avait l'habitude de dire que l'indifférence signifie se ranger du côté du bourreau et que le silence finit par être devenir complicité avec le mal. Je pense qu'il est crucial d'agir. Nous ne savons jamais quel impact pourra avoir une action que nous prenons. Je sais seulement que si nous n'agissons pas, non seulement nous n'aurons pas d'impact, mais nous encouragerons ceux qui agissent négativement contre nous. L'action et les efforts citoyens d'argumentation peuvent étayer notre effort individuel et collectif ».
Photos 1, 3, 5, 6 :
Captures d'écran pendant le webinaire
Photo 2:
Le Prof. Ariel Porat (Crédit : Université de Tel-Aviv)
Photo 4:
Rassemblement pour les familles des otages, Tel-Aviv, 12.11.23 (Crédit: S. C-Wiesenfeld)
FONDS D'URGENCE
Tsahal a rappelé 6 000 étudiants et étudiantes de l'Université de Tel-Aviv
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